L’anaglyphe ➜
Une technique de 3D stéréoscopique
Le dessin en 3D
Création d’anaglyphes en peinture
La vision stéréoscopique exploite la perception du relief et de la profondeur intrinsèque à la vision binoculaire.
Par l’utilisation de couleurs complémentaires sur un même dessin et l’emploi de lunettes 3D aux filtres rouge et bleu, l’anaglyphe soumet au regard deux visuels décalés d’un même sujet. Chaque œil voit une image différente car les filtres des lunettes séparent les couleurs.
Cependant la création d’anaglyphes nécessite une compréhension des principes de la stéréoscopie, de l’utilisation des couleurs, ainsi que de l’alignement précis du motif pour obtenir l’effet tridimensionnel désiré.
Cet article présente les méthodes de conception et de réalisation d’un anaglyphe et y apporte des explications.
« Guerniquée » – 130 × 260 cm (Diptyque composé de deux formats de 130 × 130 cm)
Encre de Chine et encre à l’alcool sur papier marouflé sur toile de lin
Principe de la 3D stéréoscopique
Vision binoculaire
La vision binoculaire est définie par l’utilisation synchrone des deux yeux.
Si certains animaux ont les yeux placés sur les côtés de la tête pour augmenter le champ visuel global (on parle de vision monoculaire), d’autres – dont nous faisons partie – ont les yeux placés sur le devant de la tête. Ceci permet d’avoir une vision binoculaire et stéréoscopique, mais réduit aussi le champ de vision. Avec les deux yeux, on dispose d’un champ de vision horizontal d’environ 180 degrés quand celui de certains oiseaux peut atteindre 360°.
Ce mode de vision confère des atouts non négligeables dont le principal est l’appréciation des distances. S’il améliore la détection d’objets émettant des rayons lumineux faibles grâce à la sommation binoculaire, il permet surtout d’avoir une vision stéréoscopique.
C’est la vision stéréoscopique qui nous donne la capacité de percevoir la profondeur et d’évaluer les distances.
Ce principe a été décrit pour la première fois par Charles Wheatstone à la Royal Academy of Arts. Ce physicien anglais a inventé en 1838 le premier stéréoscope connu – composé de deux miroirs à angle droit – pour expliquer le phénomène de la perception du relief par la vision binoculaire (également appelée stéréoscopie ou stereopsis).
Si l’on observe l’infini, les images provenant de chaque œil sont presque identiques, or, si l’on se focalise sur un objet relativement proche, les images perçues par l’œil droit et par l’œil gauche sont nettement différentes. En effet, la position de chaque œil entraine un léger décalage entre les deux images perçues. Le cerveau synthétise ces deux images pour obtenir une vision globale et tridimensionnelle de l’environnement.
Support des lunettes aux filtres rouge et bleu
Technique de création d’images en relief, l’anaglyphe exploite la capacité du cerveau à reconstituer une image en 3 dimensions par la combinaison des informations visuelles provenant de chaque œil. Elle consiste à séparer les vues de l’œil gauche et de l’œil droit dans une même image en utilisant des couleurs complémentaires, généralement le rouge et le cyan.
Pour percevoir cette dimension supplémentaire, il est nécessaire de porter des lunettes aux filtres rouge et cyan. Le filtre rouge est porté devant l’œil gauche, tandis que le filtre cyan est porté devant l’œil droit.
L’image composée de rouge et de cyan disparaît complètement devant ses couleurs respectives : lorsqu’on la regarde avec ces lunettes, le rouge disparaît à l’œil gauche alors que le cyan se révèle en niveaux de gris (la combinaison de couleurs complémentaires pures produisant du noir) et réciproquement. Ce procédé permet de décaler horizontalement la vision perçue par chaque œil, c’est cette différence qui crée l’effet 3D.
Stéréoscopie composée à partir de deux images de la même scène saisies à partir de positions légèrement différentes, par l’utilisation de couleurs complémentaires pour avoir recours indépendamment à chaque œil et en superposant ces deux couches de peinture, cette technique crée l’illusion de relief et de profondeur sur un seul et même format à la surface plane.
« Elephant Man » – 100 × 120 cm
Encre de Chine et encre à l’alcool sur papier marouflé sur toile de lin
Anaglyphe, réalisation d’une peinture en 3D
En avril 2022 Samuel Favarica a commencé la réalisation d’un premier dessin en 3D, adoptant la technique de l’anaglyphe.
Procédé théorisé dès le milieu du XIXe siècle, puis perfectionné en 1891 par Louis Ducos du Hauron, son principe est fondé sur la séparation des couleurs et la compréhension du cerveau qui restitue une image en trois dimensions par la combinaison des informations visuelles provenant de chaque œil.
On regarde un anaglyphe avec des lunettes 3D conçues à cet effet, pour produire artificiellement la vision tridimensionnelle d’après un dessin sur une surface plane.
Répondant au galeriste René Réthoré qui lui a proposé de participer à une exposition collective d’art érotique à la Galerie Duchoze située à Rouen, Samuel décide de traiter le sujet en grand, par une réalisation de grand format, en trois dimensions.
Poutine violait l’Ukraine, le sujet était là.
Le tableau « Guerniquée » entrait dans la troisième dimension.
Vidéo à 360° des ateliers d’anaglyphes, dessins en 3D avec Samuel Favarica au centre culturel André Malraux de Rouen.
Ateliers de création d’anaglyphes
Conception de dessins en 3D
Lors de son exposition d’anaglyphes « Favarica en 3D » qui s’est tenue du 10 octobre au 10 novembre 2022, l’artiste Samuel Favarica a animé des ateliers de peinture stéréoscopique, gratuits et ouverts au public chaque samedi après‑midi.
Ceux‑ci se sont organisés autour d’une initiation aux principes de la stéréoscopie et plus particulièrement des anaglyphes, des exercices de réalisation pratique et de la création d’un dessin personnel. Cet événement a été programmé à Rouen par Automne Curieux avec le centre culturel André Malraux.
L’art en 3D
Un procédé fondé sur la vision binoculaire
Aspects techniques à connaître pour la conception d’anaglyphes en peinture
- Comprendre comment la technique de la stéréoscopie fonctionne pour créer une illusion de profondeur en utilisant des images séparées pour chaque œil.
- Comprendre les couleurs complémentaires rouge et cyan utilisées pour concevoir des anaglyphes.
- Savoir comment créer une image pour chaque œil afin d’obtenir l’effet de relief par l’utilisation de ces couleurs complémentaires.
- Comprendre comment calibrer ces images pour s’assurer qu’elles sont alignées correctement afin de créer l’effet stéréoscopique.
- Savoir comment présenter les anaglyphes, y compris la distance optimale à laquelle le spectateur doit se positionner pour une expérience pleinement immersive.
- Connaître les limites et les avantages de l’utilisation des anaglyphes en conjonction avec d’autres techniques de peinture.
Exposition de peinture en 3D stéréoscopique
Des lunettes 3D pour créer une interaction avec le public
L’utilisation des anaglyphes dans une exposition de peinture offre de nombreux intérêts.
Tout d’abord, les anaglyphes suscitent la curiosité et l’émerveillement en proposant une expérience visuelle immersive. Les spectateurs sont attirés par cette technique artistique qui crée une illusion de relief et de profondeur, ajoutant une dimension supplémentaire aux œuvres exposées.
Il permettent également d’établir une relation ludique et interactive avec le public. Le prêt de paires de lunettes bicolores encourage les visiteurs à participer activement à l’exposition et engage au dialogue, favorisant les échanges et les discussions autour des œuvres présentées.
Ce qui amène aussi à une réflexion sur la vision et la perception, incitant le spectateur à se questionner sur les mécanismes de la vision binoculaire, sur la façon dont nous combinons les images pour percevoir le relief.
Parallèlement à l’exposition elle‑même, des ateliers de création d’anaglyphes peuvent être organisés pour permettre à chacun d’en comprendre le principe et de créer ses propres peintures ou dessins en trois dimensions.
Les anaglyphes suscitent indéniablement la curiosité et l’intérêt des visiteurs. Ils transforment une exposition de peinture en un événement dynamique et divertissant, enrichissant et engageant, qui s’adresse à un plus large public que celui traditionnellement habitué à fréquenter les galeries d’arts.
« La Créature du marais » – 114 × 162 cm
Encre de Chine et encre à l’alcool sur papier marouflé sur toile de lin
Questions courantes (FAQ)
Qu’est‑ce qu’un anaglyphe ?
Les anaglyphes, images conçues pour être vues en 3D avec deux filtres de couleurs différentes disposés devant chacun des yeux de l’observateur, existent depuis le XIXe siècle.
Décrit dès 1853, ce procédé fut présenté en 1858 à l’Académie des sciences de Paris et perfectionné puis mis au point en 1891 par le français Louis Ducos du Hauron qui lui en donna ce nom, anaglyphe, du grec stéréo (spatial) et scope (vision).
Un anaglyphe est conçu en employant deux couleurs complémentaires sur une surface plane (généralement le rouge et le cyan – nuance de vert et de bleu) pour produire une image en 3D lorsqu’elle est visualisée avec des lunettes aux filtres de couleurs appropriées.
Technique de stéréoscopie, composé avec deux images de la même scène depuis des positions légèrement différentes, il est vu à travers des lunettes 3D rouge et bleu pour créer l’effet de profondeur tridimensionnel. Les images sont superposées et les lunettes permettent à chaque œil de voir une image distincte, donnant l’illusion de relief.
Les anaglyphes sont utilisés pour une variété de fins, notamment dans l’art, la réalité virtuelle et la création de contenus pour les films et les jeux vidéo.
Comment savoir si une image est un anaglyphe ?
Les anaglyphes sont typiquement reconnaissables par le décalage horizontal de couleurs rouge et cyan des formes et des motifs qui le composent.
Enfin, vous pouvez savoir si une image est un anaglyphe en la regardant avec des lunettes 3D rouge et cyan (dites rouge et bleu par abus de langage) ; si l’image apparaît en relief, alors c’est un anaglyphe !
Peut‑on regarder un anaglyphe sans lunettes 3D ?
Non, les anaglyphes nécessitent des lunettes 3D pour être vus correctement.
Les lunettes stéréoscopiques bicolores rouge et cyan pour la vision en 3D filtrent la lumière et permettent à chaque œil de voir une image différente, créant ainsi la profondeur et le relief nécessaires à l’effet 3D.
Comment fonctionnent les lunettes rouge et bleu ?
Ceux‑ci fonctionnent en filtrant les couleurs pour chaque œil, créant ainsi un effet de stéréoscopie.
Les couleurs des lentilles sont toujours complémentaires.
Il s’agit en réalité de filtres rouge et cyan, et non rouge et bleu comme on le dit communément : Ces deux dernières n’étant pas complémentaires, elles ne pourraient pas faire apparaitre l’effet de 3 dimensions.
Deux images distinctes sont combinées pour créer une illusion de profondeur et de relief – l’une en rouge et l’autre en cyan – chacune apparaissant respectivement à l’œil gauche et à l’œil droit. Les lunettes 3D filtrent les couleurs pour permettre à chaque œil de ne voir que l’image qui lui est destinée, c’est ce qui crée l’effet stéréoscopique. Le cerveau combine ensuite les deux images distinctes en une seule et même image, il en fait la synthèse pour produire cette perception immersive de volume et de profondeur.
Les oculaires des lunettes sont teintées en rouge et en cyan pour filtrer la lumière et permettre à chaque œil de recevoir la couleur appropriée, de faire une sélection dans l’image. L’œil droit verra l’image de couleur cyan (couleur entre le bleu et le vert), tandis que l’œil gauche verra l’image de couleur rouge.
« Les lunettes 3D rouge et bleu » fonctionnent donc en séparant les couleurs de l’image vues par chaque œil.
Où se procurer des lunettes 3D ?
Les lunettes bicolores rouge et cyan figurent souvent au catalogue des principaux sites de vente en ligne et des boutiques Internet spécialisées en technologies 3D.
Elles sont également disponibles dans les expositions d’anaglyphes.
Les couleurs rouge et bleu sont‑elles les seules disponibles ?
Non, il existe d’autres types de lunettes stéréoscopiques, notamment les lunettes polarisantes ou les lunettes à occultations alternées. Cependant, elles concernent d’autres technologies et les lunettes 3D rouge et cyan sont utilisées pour les anaglyphes. en raison de leur accessibilité et de leur coût abordable.
Si d’autres teintes étaient également utilisées, comme les couleurs complémentaires magenta et vert ou jaune et bleu, elle furent abandonnées dans un souci de normalisation et de standardisation au profit des filtres aux nuances rouge et cyan.
Comment créer des anaglyphes ?
La base de la création d’un anaglyphe en peinture, dessin ou tout autre médium, réside dans le choix des couleurs qui serviront à sa réalisation. Celles‑ci devront être absolument identiques à celles des filtres des lunettes, afin de disparaître devant eux. Le cyan que vous utiliserez deviendra invisible devant le filtre cyan des lunettes, mais apparaîtra comme noir vu à travers le filtre rouge parce qu’il en est la couleur complémentaire, et inversement.
Par convention on positionne le filtre rouge devant l’œil gauche et le filtre cyan devant l’œil droit. Si vous décalez, sur le dessin d’un sujet, le rouge à gauche et le cyan à droite, celui‑ci apparaîtra au premier plan, à l’inverse celui‑ci viendra en retrait.
Les résultats sont excellents pour les images en noir et blanc, ou composées de niveaux de gris car les couleurs des lentilles, complémentaires, révèlent la couleur opposée en niveaux de gris. Par exemple, il serait vain car antagoniste de vouloir intégrer des anaglyphes à des visuels figurant des objets de couleur rouge sur fond bleu. La technique deviendrait incompatible avec le sujet.
Dans le domaine de la photographie, on peut très facilement créer un anaglyphe en prenant en photo un sujet immobile à deux reprises avec un léger décalage de l’objectif ou en réalisant directement des prises de vues avec un appareil stéréoscopique. Il est donc possible de créer des anaglyphes avec un peu de connaissances en photographie et en retouche photo.
Il existe également des logiciels et des applications en ligne, dont le résultat reste toutefois plus ou moins convaincant, capables de générer des anaglyphes à partir d’une seule image.
Les anaglyphes sont‑ils toujours utilisés aujourd’hui ?
Oui, les anaglyphes sont toujours utilisés aujourd’hui, bien que leur popularité ait diminué avec l’avènement de nouvelles technologies 3D telles que la réalité virtuelle, les lunettes polarisantes et les lunettes 3D actives.
Pourquoi utiliser les anaglyphes dans la création artistique ?
Les anaglyphes peuvent être utilisés pour diverses formes d’expression artistique, comme la photographie, la peinture, la vidéo et la projection.
Leur utilisation offre un parcours immersif en 3D au sein des compositions ce qui renforce l’expérience visuelle du spectateur. Cela crée une illusion de profondeur et de relief qui peut être très puissante dans une œuvre d’art. Ils amènent encore différents niveaux de lecture ou permettent de dissimuler des éléments, imperceptibles au premier regard…
Il s’instaure une relation différente avec les visiteurs. La curiosité technique et expérimentale retient également leur attention, ce qui amène un dialogue supplémentaire. Cela permet de s’ouvrir aussi à un public plus large et plus hétérogène.